Le Conseil d’Etat a publié, le 14 mai dernier, un rapport sur le langage employé par les juges administratifs lors de la rédaction de leurs décisions.

Partant du constat du caractère hermétique de ce langage, le Conseil d’Etat propose un certain nombre de solutions pour le rendre plus accessible aux usagers de la justice administrative (tribunaux administratifs, cours administratives d’appel et Conseil d’Etat).

Jugements administratifs : c’est de l’hébreu ou du chinois ?

Lecteur non juriste, as-tu déjà réussi à comprendre une décision d’une juridiction administrative ?

Lecteur juriste, te souviens-tu de tes premiers commentaires d’arrêts du Conseil d’Etat ?

Quelle que soit leur expérience, la plupart des gens qui ont eu à lire pour la première fois une décision d’une juridiction administrative se sont retrouvés dans la situation d’une poule qui a retrouvé un couteau, face à un abîme d’incompréhension et de perplexité, avec une seule réaction à l’esprit : « Hein ? ».

Le Conseil d’Etat le reconnaît lui-même : le langage utilisé par les juridictions administratives ne permet pas « de rendre compte le plus clairement possible à un public plus large de l’application qu’il fait d’un droit toujours plus complexe ».

C’est le moins que l’on puisse dire.

La justice administrative française est d’ailleurs une des dernières en Europe à ne pas être passée à un style d’écriture plus commun.

Une des principales caractéristiques de ces décisions est l’utilisation d’une phrase unique qui englobe l’exposé de l’affaire, les demandes des parties et les motivations qui expliquent la décision. Et cela, quelle que soit la longueur de l’arrêt ou du jugement, qui peut parfois représenter jusqu’à plusieurs dizaines de pages !

Cette phrase unique est ponctuée de subordonnées débutant par « Vu le mémoire… », « Vu les autres pièces… » ou « Considérant que… », séparées par des points virgules.

Vous imaginez que tout cela n’aide pas à la compréhension du quidam moyen.

Selon le Conseil d’Etat, le caractère hermétique de ce langage a plusieurs explications, et notamment :

- le peu d’évolution des méthodes de rédaction depuis la création des juridictions administratives, qui remonte à Napoléon,

- la variété des publics concernés par ces décisions,

- la technicité de plus en plus grande des domaines abordés par les juridictions administratives.